Les soins dirigés par les payeurs
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L’Association des pharmaciens du Canada (APhC) a annoncé s’opposer fermement aux soins dirigés par les payeurs. La nouvelle prise de position résulte de la tendance croissante des assureurs privés et des gestionnaires de régimes d’assurance-médicaments à diriger les soins des patients, ce qui finit par compromettre la qualité des soins de santé de la population canadienne et son accès aux soins.
Ce que disent les Canadiens
Les soins dirigés par les payeurs ont déjà des conséquences générales et préoccupantes dans tout le Canada, mais il est évident que les patients préfèrent avoir le choix et tiennent à la relation de confiance qu'ils entretiennent avec leurs équipes de pharmacie. D’après un récent sondage national réalisé par Abacus Data :
- 8 % des Canadiens (près de 3 millions de personnes) déclarent avoir changé de pharmacie parce que leur assureur le leur recommandait.
- 86 % des Canadiens pensent qu’ils devraient pouvoir faire exécuter des ordonnances dans n’importe quelle pharmacie autorisée, quel que soit leur assureur.
Les actions de défense des intérêts menées par l’APhC
L’APhC demande aux gouvernements de tout le Canada de limiter les soins dirigés par les payeurs et de protéger l’intégrité de la relation entre le patient et le pharmacien. La réglementation proposée vise à :
- Garantir des soins axés sur le patient en interdisant aux gestionnaires de régimes d’assurance-médicaments de lui dicter où il peut faire exécuter ses ordonnances et en ordonnant que la couverture et la délivrance des médicaments reposent sur des pratiques cliniques exemplaires.
- Limiter la formation de réseaux de fournisseurs préférentiels, afin de permettre une concurrence loyale et d’éviter toute discrimination.
- Établir des pratiques d’audit transparentes avec des lignes directrices claires, afin que les audits soient réalisés de manière équitable et sans conflits d’intérêts.
ÉNONCÉ DE POSITION DE L’APhC
Les soins dirigés par les payeurs
Énoncé
À l’Association des pharmaciens du Canada (APhC), nous sommes convaincus que les soins de qualité fournis par les pharmaciennes et les pharmaciens sont essentiels à la bonne santé de l’ensemble de la population canadienne. Nous pensons également que des soins dirigés par les payeurs interfèrent avec la relation stable et de confiance que les pharmaciens entretiennent avec leurs patients, ce qui sape le principe des soins centrés sur les patients.
Nous croyons fermement que les patients doivent pouvoir accéder à un éventail complet de médicaments et de traitements, dans la pharmacie de leur choix, et auprès du pharmacien de leur choix, en veillant à ce que les décisions soient prises en fonction des besoins de santé et non des incitations ou des directives des payeurs de soins de santé. En tant que spécialiste des médicaments, un pharmacien devrait pouvoir sélectionner la meilleure solution de traitement possible pour chaque patient, en se fondant sur les meilleures données disponibles. Or, les politiques des payeurs qui visent à restreindre ce pouvoir ne servent pas l’intérêt supérieur des patients et des participants au régime de soins de santé.
Contexte
Au Canada, la profession de pharmacien est strictement réglementée afin de veiller à ce que les patients bénéficient d’excellents soins axés sur les patients.
Désireux de réduire leurs coûts, les assureurs privés et les gestionnaires de régimes d’assurance-médicaments, qui fournissent un remboursement des médicaments à leurs participants, agissent de plus en plus directement sur les soins que les patients reçoivent des professionnels de la pharmacie. Partout au Canada, ils utilisent de plus en plus la pratique consistant à « diriger les patients » vers des pharmacies qui leur appartiennent ou vers des réseaux de fournisseurs préférentiels.
Les patients qui n’utilisent pas les pharmacies ainsi désignées doivent parfois payer de leur poche des sommes plus élevées, parce que leurs médicaments d’ordonnance ne sont pas entièrement couverts, voire pas du tout. Dans certains cas, si un patient n’a pas, près de chez lui, une pharmacie faisant partie d’un réseau de fournisseurs préférentiels, il doit se déplacer très loin pour en trouver une ou commander ses médicaments auprès d’une pharmacie postale, sans avoir la possibilité de consulter un pharmacien en personne.
Les pharmacies qui ne font pas partie de l’un de ces réseaux de fournisseurs préférentiels subissent un désavantage concurrentiel. Elles peuvent enregistrer une baisse considérable du volume de prescriptions, ce qui multiplie leurs difficultés financières. Cette situation peut avoir des conséquences plus vastes sur l’accès aux soins de santé dans les régions rurales et éloignées, où les pharmacies sont parfois le seul point d’accès aux soins primaires. Ce sont les petites pharmacies, ou les pharmacies indépendantes, qui risquent le plus d’être tenues à l’écart de ces réseaux de fournisseurs préférentiels, en raison de leur faible pouvoir de négociation.
Appel à une réglementation
À l’APhC, nous pensons que le patient doit être le seul à pouvoir choisir sa pharmacie et qu’il doit pouvoir obtenir ses médicaments dans la pharmacie de son choix. Nous appelons instamment tous les gouvernements du pays à imposer des limites aux soins dirigés par les payeurs et à réglementer les pratiques des assureurs et des gestionnaires de régimes d’assurance-médicaments qui sapent la relation de confiance entre le patient et le pharmacien.
Le cadre de réglementation devrait comprendre des dispositions visant à mettre en place ce qui suit :
- Des soins axés sur le patient. Les politiques et les pratiques des gestionnaires de régimes d’assurance-médicaments doivent accorder la priorité aux résultats des patients en matière de santé plutôt qu’à des mesures d’économies financières. La couverture et la délivrance des médicaments doivent uniquement reposer sur les pratiques cliniques exemplaires et sur les besoins individuels des patients. Les gestionnaires de régimes d’assurance-médicaments ne devraient pas pouvoir imposer à un patient le lieu où celui-ci pourra se procurer ses médicaments. Plus précisément, cette réglementation devrait prévoir ce qui suit :
- Des limites concernant les réseaux de fournisseurs préférentiels. Veiller à ce que les gestionnaires de régimes d’assurance-médicaments ne puissent pas discriminer une pharmacie ou un groupe de pharmacies, afin de permettre une concurrence loyale.
- Des règles concernant les conflits d’intérêts, en particulier, ceux qui surviennent quand les gestionnaires de régimes d’assurance-médicaments appartiennent à des assureurs ou à des entreprises pharmaceutiques, ou sont affiliés à ceux-ci.
- Des pratiques d’audit transparentes. Établir des lignes directrices claires, équitables et normalisées concernant les audits des gestionnaires de régimes d’assurance-médicaments. Ces lignes directrices empêcheront les pratiques qui pénalisent injustement les pharmacies pour de petites erreurs techniques et veilleront à ce que les audits soient menés avec un préavis et selon des critères raisonnables. La réglementation devrait comprendre ce qui suit :
- Des dispositions sur les conflits d’intérêts. Fixer des règles visant à prévenir des conflits d’intérêts dans lesquels les gestionnaires de régimes d’assurance-médicaments ou leurs auditeurs pourraient tirer parti des résultats de leurs propres audits.
- Une protection pour les pharmacies. Instaurer des mesures de protection en faveur des pharmacies afin d’empêcher les recouvrements liés aux audits aux effets financiers dévastateurs et également mettre en place des procédures de règlement équitable des différends.