Canadian Pharmacists Association
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Le point sur la pharmacie : Rencontre avec Camille Gagnon

Camille Gagnon

Camille Gagnon, PharmD, MSc (elle/elle)
Directrice adjointe, Réseau canadien pour l’usage approprié des médicaments et la déprescription
Montréal (Que.)

Camille est directrice adjointe du Réseau canadien pour l’usage approprié des médicaments et la déprescription (ReCAD) depuis 2017. Le ReCAD a pour mission de rendre l’usage des médicaments plus sécuritaire pour tous les Canadiens et Canadiennes en éliminant les effets néfastes causés par les médicaments. Aux côtés d’une équipe dévouée, Camille contribue au développement, à la planification et à la coordination des efforts de promotion et de recherche en santé menés par le réseau. Les différents partenaires ne manquent, et incluent des membres du public, des patients partenaires, des professionnels de la santé, des chercheurs et des décideurs. Pour accroître l’impact des initiatives menées, Camille facilite la collaboration entre ces différents acteurs. Les activités de Camille au quotidien incluent la préparation de communications pour sensibiliser le grand public et les décideurs à l’usage sécuritaire des médicaments, le développement et la diffusion d’outils pour les professionnels facilitant la déprescription, et un soutien aux comités et aux projets de recherche menés par l’équipe du réseau et ses membres.

Avant de joindre le réseau, Camille a travaillé comme pharmacienne communautaire, de même qu’en groupe de médecine familiale à Ottawa et à Montréal. C’est en étant pharmacienne au sein d’une équipe multidisciplinaire en charge d’évaluer des patients avec troubles cognitifs suspectés qu’elle a pu constater tout le potentiel de la déprescription pour améliorer la qualité de vie des gens. Camille a aussi travaillé en gestion de programmes cliniques dans le domaine de l’assurance privée, ce qui lui a permis de découvrir les différentes réalités – et les inégalités - en matière d’accès aux médicaments d’ordonnance au pays. Camille a aussi œuvré comme enseignante de pharmacologie auprès de futurs techniciens en pharmacie. Elle détient une maîtrise en santé publique de l’École de santé publique de l’Université de Montréal, ce qui lui a permis de découvrir la grande valeur des interventions de prévention et de promotion pour améliorer durablement la santé.

Questions et réponses avec Camille

Nous avons rencontré Camille pendant le Mois de la reconnaissance de la pharmacie pour parler pour parler de son rôle dans la santé publique et la recherche, et de ce que le pouvoir de la pharmacie signifie pour elle.

Cette année, le Mois de la reconnaissance de la pharmacie a pour thème « Le pouvoir de la pharmacie ». Qu’est-ce que cela signifie pour vous?

« Le pouvoir de la pharmacie » est si grand ! Pensons seulement aux effets néfastes causés par les médicaments qui peuvent, au mieux, avoir des conséquences dérangeantes pour les patients, et au pire, mettre leur santé en péril. Les pharmaciens sont les professionnels les mieux placés pour reconnaître ces effets néfastes et mettre de l’avant une marche à suivre pour les traiter, et encore mieux, dans plusieurs cas, les prévenir. Une intervention au bon moment fait donc toute la différence ! En faisant davantage connaître notre expertise et nos activités (notre « pouvoir »!) au grand public et aux autres professionnels de la santé, on nous donnera davantage d’opportunités de faire cette différence. C’est une roue qui tourne !

L’une des choses les plus enthousiasmantes d’une carrière dans la pharmacie, c’est la grande diversité de rôles que les pharmaciens peuvent remplir et l’incidence qu’ils peuvent avoir, de nombreuses manières différentes. Parlez-nous de votre rôle et de ce qui fait son unicité.

En tant que pharmacienne travaillant dans le domaine de la santé publique et de la recherche, j’ai la chance de travailler avec une panoplie d’individus et d’organismes qui ont des expériences et des perspectives différentes par rapport aux médicaments et à la façon dont ils sont utilisés. Cela est extrêmement enrichissant ! Cela m’a permis de développer au fil du temps une perspective plus globale de ces enjeux. Pour promouvoir la déprescription et espérer influencer la façon dont les médicaments sont utilisés, il faut comprendre les besoins de santé et les motivations des personnes impliquées (exemple : prescripteurs, patients), mais aussi l’impact énorme des inégalités de santé.

Le médicament est au centre des soins de santé modernes. Les pharmaciens sont très bien formés pour accompagner leurs patients au travers de leur parcours de soin sur le plan individuel. Pourtant, il y a assez peu de pharmaciens en santé publique, ce que je déplore. Les opportunités sont pourtant très grandes pour qu’ils contribuent à améliorer la santé des populations !

Qu’est-ce qui vous a donné envie de remplir ce rôle? Qu’est-ce qui le rend si gratifiant?

C’est d’abord en constatant l’impact positif de la déprescription sur la santé des patients à échelle individuelle que j’ai eu envie de m’investir au sein d’un réseau qui avait pour mission de rendre le tout plus accessible et concret pour les patients et les professionnels de la santé.

Le réseau me donne l’opportunité de côtoyer une variété de gens passionnés, incluant plusieurs personnes qui s’impliquent de façon complètement bénévole. J’apprends beaucoup de tous ceux et celles que je côtoie. Je suis très reconnaissante de cette opportunité.

Selon vous, dans quel domaine de pratique les pharmaciens pourraient-ils jouer un plus grand rôle afin d’améliorer les résultats pour les patients?

Bien sûr, mon travail au réseau m’amène à m’intéresser au rôle que peuvent jouer les pharmaciens pour prévenir, reconnaitre et gérer les effets néfastes des médicaments. Il va sans dire, les pharmaciens en font déjà beaucoup à cet égard ! Il y a toutefois des opportunités de développer encore plus notre rôle en ce sens.

D’abord, pour rendre l’usage sécuritaire des médicaments, les pharmaciens gagnent à être particulièrement à l’affût des situations à haut risque d’erreurs médicamenteuses (exemple : les transitions de soins), en misant sur une communication (interprofessionnelle, mais aussi avec le patient et ses proches) hors-pair.

Les pharmaciens peuvent aussi faire une différence en communiquant de façon systématique les effets néfastes possibles d’un traitement pharmacologique aux patients et à leurs proches, ainsi que la durée anticipée d’un traitement.

Dans le cas de médicaments indiqués à court terme – comme par exemple, des somnifères ou des inhibiteurs de la pompe à protons – nous pouvons mieux communiquer la durée d’utilisation recommandée de ces agents, et parler dès ce moment de déprescription, pour semer la graine et préparer le patient. Alors qu’on sait que beaucoup de patients au Canada finissent par utiliser ces agents de façon chronique et ce, sans indication, cette intervention peut faire une différence.

Finalement, tous les pharmaciens peuvent faire preuve de leadership dans leur milieu de pratique et contribuer au corpus de connaissances sur les médicaments en s’assurant que les effets indésirables subis par leurs patients soient rapportés à Santé Canada, surtout lorsque ces effets indésirables sont graves ou inattendus.

Quelle est la chose que vous aimeriez que tous les patients sachent à propos de ce que les pharmaciens peuvent faire?

J’aimerais que tous les patients sachent qu’il n’y a pas de question inadéquate ou inutile à poser au pharmacien au sujet des médicaments – pour que le canal de communication soit ouvert et transparent. Il y a beaucoup de situations malencontreuses associées aux médicaments qui peuvent être évitées avec une question posée au bon moment (ex : duplication ou omission de dose par mégarde, effets secondaires non détectés, interactions avec un produit de vente libre non mentionné par peur de jugement ou désapprobation). Le pharmacien peut être un réel allié du dicton : « Vaut mieux prévenir que guérir » - lors parlez-lui !

Qu’est-ce qui vous rend fier d’être pharmacien?

Je suis fière de voir à quel point les pharmaciens jouent un rôle essentiel comme leaders et membres du Réseau canadien pour l’usage approprié des médicaments et la déprescription ! Cela est un reflet du rôle-clé qu’ils jouent dans la société pour ce qui est de promouvoir un usage sécuritaire des médicaments.

Les pharmaciens sont créatifs : ils inventent des outils pour les professionnels de la santé à déprescrire de façon sécuritaire, et changer les pratiques !

Les pharmaciens sont innovateurs : ils développement des projets de recherche qui répondent à des questions importantes, comme : comment éliminer les obstacles à l’usage approprié des médicaments?

Les pharmaciens sont inspirants : ils sont des leaders qui portent un message sensible et posé sur les enjeux de surprescription et de polypharmacie, et qui encouragent d’autres personnes à s’impliquer !

Bref, comment ne pas être fière ?

MRP 2024