Canadian Pharmacists Association
Canadian Pharmacists Association

Mona Kwong

Mona Kwong, conseillère en pharmacie et directrice

Conseillère en pharmacie et directrice, Addiction Pharmacy Fellowship Program, BC Centre on Substance Use

Dans cette vidéo (en anglais seulement), Mona Kwong parle du traitement par agonistes opioïdes dans les thérapies contre la dépendance aux opioïdes et de la façon dont les pharmaciens peuvent contribuer à la gestion des opioïdes.

Questions et réponses avec Mona Kwong

Vous fournissez à certains patients un traitement par agonistes opioïdes (TAO). De quoi s’agit-il?

Le TAO est un traitement de la dépendance aux opioïdes (appelée trouble lié à l’utilisation des opioïdes, ou TUO), comme l’héroïne, l’oxycodone, l’hydromorphone, le fentanyl et le Percocet. Le traitement repose sur la prise de méthadone ou de buprénorphine-naloxone, qui sont des agonistes des opioïdes. Ces médicaments servent à éviter les symptômes de sevrage et à réduire les désirs impérieux de consommation d’opioïdes. Les personnes atteintes d’un trouble lié à l’utilisation des opioïdes peuvent suivre un TAO pour aider à stabiliser leur vie et à réduire les dommages de la consommation de médicaments, dont la fréquence des surdoses. Il ne s’agit là que d’une partie du traitement du TUO, et elle donne de meilleurs résultats lorsqu’elle est combinée avec d’autres formes de soutien, comme le counseling individuel ou en groupe, le traitement en résidence, l’accès à des produits et services favorisant la réduction des dommages.

Pourquoi les pharmaciens ont-ils un rôle si important dans l’aide aux patients atteints d’un trouble lié à l’utilisation des opioïdes (TUO)?

Nous établissons un lien personnel avec des patients qui ont souvent eu de mauvaises expériences dans le système de santé à cause de leur dépendance. Nous pouvons les soutenir dans leur traitement à titre de membre de l’équipe de soins de santé élargie. Nous sommes des professionnels de la santé en première ligne et nous avons de nombreux points de contact au sein de la communauté que nous servons, ce qui nous permet aussi de lutter contre la stigmatisation du TUO en éduquant d’autres personnes de la communauté à son sujet et au sujet de la santé mentale. Nous pouvons être une source de connaissances sur ces affections, en plus de fournir des ressources pour la prévention des surdoses.

Que veut dire pour vous une « vision faisant des pharmaciens les responsables des
opioïdes »?

Nous sommes les gardiens de l’utilisation adéquate des médicaments pour le bien des patients. En qualité de spécialistes des médicaments, nous avons les connaissances, les compétences et les aptitudes nécessaires pour mieux les gérer et mieux défendre les intérêts des patients atteints d’un TUO et ainsi aider à combler les lacunes dans le parcours de soins des patients.

Comment avez-vous commencé et pourquoi vouliez-vous travailler dans ce domaine?

J’ai fait mes premiers pas dans le domaine de la santé mentale dans la vingtaine, alors que je travaillais sur le VIH dans une pharmacie du West End de Vancouver. J’ai toujours fait du bénévolat auprès de personnes qui avaient besoin qu’on les défende et il était important pour moi, lorsqu’est venu le moment de choisir une formation professionnelle et de travailler en pharmacie, de trouver une pratique qui comprenne une part de défense des intérêts.

Quel impact avez-vous sur les patients?

En fait, je crois que c’est surtout eux qui ont un impact sur moi. Nos patients et leurs pairs navigateurs nous en apprennent tellement, à mon équipe et à moi, sur les lacunes et les malentendus qui existent dans le système. La communication aide à comprendre comment nous pouvons améliorer les systèmes en amont et comment nous pouvons utiliser ce que nous apprenons pour mieux soigner d’autres patients. Cela m’aide à mieux protéger les patients d’un point de vue systémique.

Que vous disent vos patients?

Un patient m’a dit dernièrement qu’il ne ressent de jugement de la part d’aucun des employés dans notre pharmacie, même de la part des étudiants que nous formons dans le cadre des rotations. Il est vraiment reconnaissant de la façon dont il est traité et il remarque que nous traitons tout le monde de la même manière, quel que soit le type de médicaments consommé ou la façon dont les patients sont habillés. Il se sent le bienvenu et il estime qu’il est de son devoir, aussi, de former les étudiants à être un jour de bons pharmaciens. C’est pourquoi, comme d’autres patients, il leur raconte son histoire.

Vous êtes également propriétaire d’une pharmacie – dans l’exercice quotidien de votre profession, avez-vous l’impression de pouvoir aider les patients qui consomment des opioïdes ou d’autres substances contrôlées?

Je suis devenue gestionnaire en 2002 et ne suis passée gérante associée qu’en 2013. Les propriétaires de ma pharmacie m’ont toujours laissé la liberté d’imaginer la pharmacie que je souhaitais, ce qui m’a permis de me concentrer sur des domaines comme le VIH, la santé mentale, les personnes âgées fragiles et les maladies chroniques. 

J’ai eu la chance d’avoir cette latitude à un moment où la stigmatisation était encore très présente dans de nombreuses autres pharmacies limitées dans leurs services et leur connaissance de certains de ces domaines de soins. Cependant, nous avons parcouru beaucoup de chemin depuis et il existe tellement de ressources dans notre province pour continuer de réduire la stigmatisation et en apprendre davantage sur le TUO, comme les OUD Guidelines, la BC ECHO OUD Series, le Provincial Opioid Addiction Treatment Support Program (POATSP), les Addiction Care and Treatment Online Courses (ACTOC) offerts à l’Université de la Colombie-Britannique, et même une ligne de soutien aux cliniciens et aux pharmaciens qui est ouverte 24 heures sur 24, 7 jours sur 7.

De quoi avons-nous besoin pour concrétiser la vision de la gestion des opioïdes par les pharmaciens? 

La planification et l’accès à un réseau de soins primaires pour les patients aideront à s’y retrouver et à mieux s’occuper des patients. Le financement de services cliniques autres que la délivrance d’ordonnances et les soins dispensés en personne dans les pharmacies nous permettra d’aider plus de personnes dans nos communautés. Je pense notamment à la possibilité d’offrir des services virtuels aux patients (par téléphone ou par vidéo) ou même à une intégration du pharmacien communautaire du patient à son réseau de soins.

Quels conseils donneriez-vous aux pharmaciens qui souhaitent pouvoir travailler avec des patients en leur fournissant un TAO?

Il est important de prendre le temps de comprendre les objectifs thérapeutiques du patient et de faire abstraction de ce que l’on souhaiterait qu’ils soient.

Il est important de réévaluer ses propres préjugés et d’y réfléchir pour apprendre et communiquer davantage sur les effets de la stigmatisation sur ses patients atteints de troubles de la santé mentale et de troubles liés à l’usage de substances, et d’en reconnaître l’incidence possible sur les soins qu’ils reçoivent.

Il faut aussi être conscient du fait que le langage que nous utilisons peut être stigmatisant et, donc, veiller à réduire la stigmatisation en utilisant un langage respectueux et centré sur la personne. Autrement dit, il ne faut pas, par exemple, qualifier une personne de toxicomane (mais plutôt lui dire qu’elle est atteinte d’un trouble lié à l’usage de substances). Notre stigmatisation inconsciente peut dissuader des personnes de demander de l’aide.

Il y a dans nos études antérieures un manque de formation en matière de santé mentale et de troubles liés à l’usage de substances, mais les nouvelles occasions d’apprendre grâce à différents types de ressources sont nombreuses. 

Pleins feux sur la gestion des opioïdes est une série continue en appui à l’Initiative des pharmaciens pour la gestion des opioïdes dans le cadre de l’Harmonisation du champ d'exercice des pharmaciens canadiens (HCEPC) 2020.