Le point sur la pharmacie : Rencontre avec Sasha Merasty
Sasha Merasty, candidate au PharmD en 2024 (elle/elle)
Étudiante et stagiaire en pharmacie, Université de la Saskatchewan
Sasha Merasty est actuellement inscrite en quatrième année du programme de doctorat en pharmacie (PharmD), promotion de 2024, au Collège de pharmacie et de nutrition de l’Université de la Saskatchewan. Mme Merasty, qui a grandi à Saskatoon (Saskatchewan), appartient à la Première Nation Peter Ballantyne. Elle travaille actuellement à temps partiel comme stagiaire en pharmacie dans une pharmacie communautaire de Saskatoon. Très jeune, elle s’est passionnée pour l’engagement communautaire et elle espère continuer de défendre les intérêts des populations autochtones défavorisées. À l’heure actuelle, Mme Merasty siège au conseil d’administration des PAPC où elle espère créer plus de possibilités de financement pour les étudiants autochtones qui souhaitent étudier la pharmacie. Mme Merasty défend ardemment les objectifs de santé des Autochtones et elle pense que le mieux pour les atteindre est d’apprendre comment les remèdes traditionnels étaient obtenus et de comprendre la relation entre la terre, le remède et les collectivités autochtones. Elle espère offrir des possibilités de sensibiliser davantage les collectivités autochtones aux soins de santé et elle veut créer des possibilités d’apprentissage pour que les patients autochtones participent plus activement à leurs plans et à leurs objectifs en matière de soins de santé. Dans sa carrière pharmaceutique, elle espère encourager des soins sans préjugés et inciter d’autres personnes à réfléchir continuellement à des solutions pour mieux servir les populations autochtones du Canada.
Questions et réponses
Nous avons rencontré Sasha Merasty pendant le Mois national de l’histoire autochtone pour parler de certains des obstacles et des difficultés que rencontrent les patients autochtones lorsqu’ils veulent accéder à des services, et voir comment les pharmaciens et les étudiants en pharmacie peuvent fournir aux collectivités autochtones des soins de santé adaptés aux différences culturelles et tenant compte des traumatismes.
Quelle est la principale chose que peuvent faire les pharmaciens pour créer un espace sécuritaire et inclusif pour les patients autochtones?
La chose la plus importante que les pharmaciens puissent faire pour créer un espace sécuritaire et inclusif pour les patients autochtones est de comprendre la culture autochtone et les objectifs de santé des Autochtones, et je crois que le mieux pour atteindre ces objectifs est d’apprendre comment les remèdes traditionnels étaient obtenus et de comprendre la relation entre la terre, le remède et les collectivités autochtones. Les pharmaciens peuvent fournir aux Autochtones des soins de santé adaptés aux différences culturelles et tenant compte des traumatismes en s’informant sur l’histoire autochtone du Canada et en y réfléchissant. C’est la première étape pour vraiment comprendre les disparités en matière de santé auxquelles font face les collectivités autochtones au Canada.
Pourquoi est-il important d’avoir des soins de santé adaptés aux différences culturelles, surtout dans une pharmacie?
Il est important d’avoir des soins de santé adaptés aux différences culturelles dans les pharmacies, car les pharmaciens sont souvent le premier point de contact des patients qui veulent demander conseil sur des traitements médicaux. De plus, les pharmaciens jouent aussi un rôle important après que les patients ont consulté un médecin. Qu’ils rencontrent le patient après une consultation avec un médecin ou que le patient ait des questions sur des médicaments en vente libre, leur interaction joue un rôle important dans la façon d’offrir un service qui promeut la sécurité et essaie de ne pas accentuer des traumatismes subis auparavant dans le système de santé. Pour répondre aux besoins de leurs patients, les pharmaciens devraient créer des services axés sur le patient, tout en éliminant les difficultés que rencontrent souvent les patients autochtones et qui entraînent des disparités en matière de santé. Si les pharmaciens sont sensibles aux différences culturelles, ils obtiendront de meilleurs résultats pour les patients. Reconnaître ses propres préjugés en tant que pharmacien et se familiariser avec d’autres cultures aide à construire une relation avec le patient et accroît la sensibilité culturelle, et une relation solide entre le patient et le pharmacien permettra d’obtenir de meilleurs résultats pour le patient.
Comment les pharmaciens peuvent-ils jouer un plus grand rôle dans la défense de soins de santé inclusifs et tenant compte des différences culturelles, surtout pour la communauté autochtone?
Les pharmaciens peuvent jouer un plus grand rôle dans la défense de soins de santé inclusifs et tenant compte des différences culturelles dans les collectivités autochtones en établissant des programmes tournés vers l’avenir des soins de santé dans la collectivité, par exemple, en offrant des possibilités d’emploi et de mentorat à des Autochtones intéressés par une carrière dans la pharmacie et les soins de santé. La meilleure façon d’apporter des changements positifs dans un système, c’est par une forte représentation éduquée. Par conséquent, plus les Autochtones seront nombreux à participer au système de santé canadien, plus le savoir et la médecine autochtones seront inclus dans ce système. Aucune culture ne sait tout sur les soins de santé et les traitements. L’intégration culturelle ne peut que renforcer les connaissances en soins de santé. De plus, offrir des soins tenant compte des traumatismes et informer les collectivités autochtones sur des choses comme la couverture des Services de santé non assurés (SSNA) et les ressources communautaires revient à défendre les intérêts communautaires en apprenant aux collectivités autochtones à bénéficier du système de santé de manière plus productive. Enfin, solliciter des membres et des soutiens de la collectivité pour des choses comme des interactions avec les aînés et la sensibilisation communautaire établira une culture de soutien de la culture autochtone et du savoir traditionnel.
Quelle est la plus grande erreur que commettent les fournisseurs de soins de santé lorsqu’ils s’occupent de patients autochtones et comment peuvent-ils mieux faire?
Une des plus grandes erreurs que commettent les fournisseurs de soins de santé dans les soins aux patients autochtones est de ne pas prendre en compte des facteurs les concernant qui peuvent avoir une incidence sur le transfert des soins à leurs collectivités et des processus de congé qui peuvent constituer des obstacles aux soins. Les plans de traitement des patients autochtones de collectivités isolées doivent tenir compte de toute difficulté que le patient peut éprouver à prendre des dispositions pour se déplacer et de la distance de la pharmacie la plus proche. Ils doivent aussi tenir compte des heures de fermeture de ces pharmacies avant de donner leur congé aux patients qui ont besoin de produits pharmaceutiques avant de retourner dans leurs collectivités. Par ailleurs, il est important de ne pas écarter les traitements traditionnels autochtones en raison de préjugés occidentaux favorables aux produits pharmaceutiques et de veiller à ce que les pharmaciens adaptent leurs plans de soins aux besoins et aux objectifs en matière de santé des patients. Les fournisseurs de soins de santé peuvent mieux faire en étant prêts à travailler avec le savoir et la médecine autochtones afin de prendre en compte les croyances et les traditions culturelles des patients dans les plans de soins. Il est important pour des soins axés sur le patient de travailler en collaboration avec le patient à la définition d’un plan de soins, mais cela garantit aussi que le patient est acteur des décisions concernant les soins de santé et qu’il n’a pas l’impression que le traitement lui est imposé. De plus, les patients qui participent à la définition de leur propre plan de soins de santé sont plus susceptibles de s’y conformer et d’atteindre leurs objectifs en matière de soins de santé. Nous devons aider la personne à arriver à son idée d’être en bonne santé, pas à notre idée de sa santé.
Quelle est pour vous la partie la plus gratifiante de l’exercice de la pharmacie?
La partie la plus gratifiante pour moi de l’exercice de la pharmacie, ce sont les relations que je noue avec mes patients et ma collectivité. Les pharmaciens sont considérés comme les fournisseurs de soins de santé en qui on a le plus confiance, et je tiens à défendre cette réputation. C’est un honneur de faire partie de la vie de patients et d’y jouer un rôle en répondant à leurs besoins en matière de soins de santé. Souvent, j’apprends et j’ai un impact sur leur vie simplement en aidant quelqu’un qui a attrapé froid, en aidant à choisir les bons médicaments pour un enfant ou en aidant à résoudre les interactions médicamenteuses indésirables afin d’éviter des effets secondaires. J’aime voir les patients sourire quand je peux les aider par rapport à la couverture des coûts ou fournir des ressources pour aider leur collectivité. Même quelque chose d’aussi simple que d’aider quelqu’un à utiliser son glucomètre est gratifiant parce que je rentre chez moi en sachant que j’ai apporté mon petit écot, et mon objectif est de faire chaque jour tout mon possible pour mes patients en faisant en sorte de bien faire les petites choses.
Je pense aussi que s’investir dans les collectivités est gratifiant et nécessaire parce que cela nous aide à comprendre quelles bases des soins de santé manquent dans la collectivité. Les bases des soins de santé sont simples, mais souvent, les Autochtones n’ont pas accès à ces bases – des choses comme des soins personnels essentiels pour la santé, comme des aliments nutritifs, un logement convenable, ainsi que des services médicaux et des fournitures médicales – ou ils n’ont pas accès à l’information nécessaire pour comprendre les systèmes sur lesquels reposent les soins de santé, comme les services d’assurance, comme les SSNA.
Y a-t-il autre chose que vous aimeriez nous dire concernant l’exercice de votre profession ou un autre sujet qui vous tient à cœur?
Les populations autochtones gagneraient à être représentées dans la pharmacie et dans le système de santé, à la promotion de l’information sur les SSNA et les soins tenant compte des traumatismes. Dans ma carrière, j’espère encourager des soins sans préjugés et donner envie à d’autres de toujours montrer comment tous les fournisseurs de soins de santé peuvent mieux servir les populations autochtones. Il arrive à tout le monde d’être pris par sa vie quotidienne, mais il est important pour nous en tant que pharmaciens de progresser, d’essayer d’améliorer nos collectivités et d’aider des populations défavorisées. Réduire les disparités en matière de santé dans les collectivités autochtones est notamment un objectif que les professionnels de la santé doivent atteindre ensemble, et ouvrir dans les collectivités autochtones des pharmacies qui les respectent, qui honorent les traditions culturelles et qui nouent des liens solides avec les services existants sur place est un premier pas important vers la parité des soins de santé au Canada.